Alors, c’était comment ? C’était comme ça. Au début, ça va. C’était comment ? C’était super. Et puis après, on fatigue : c’est comme ça. Une fatigue de riche, une fatigue riche en souvenirs. On ne rappelle plus ceux qui veulent qu’on en parle, on évite même le sujet.
J’ai donc développé trois versions, selon la durée, que je suis capable de répéter tel un automate. Il faut essayer d’alterner considérations historiques, différences culturelles et - surtout - anecdotes. Dans ce dernier domaine, l’Inde vaut son pesant de minutes (cf. la série « Pourquoi j’aime l’Inde »). Il y a toujours un truc à raconter dessus au moment où la conversation flanche un peu, où on déçoit l’auditeur en lui disant que l’armée en terre cuite, à Xi’an, n’est pas « si top » (à cause du hangar), où on révèle que « non, pas de nems, en Chine » (ni au Vietnam d’ailleurs), que Hawaï, « ça va deux minutes, mais bon », que « non, j’ai pas été en Amérique du Sud ». Et là, un petit coup de monologue « Tu sais pourquoi je viens en Inde ? Parce que j’aime l’Inde » et ça repart.
Trois versions donc. La première dure autour de 30 secondes, utilisable avant de se dire au revoir, quand l’autre s’aperçoit qu’il a oublié d’évoquer la question du « tdm » (« et au fait, c’était bien ? »), ou plus communément, à une soirée, « vite fait », lorsque la musique est trop forte pour en dire plus (« waou, super. Et alors, t’es allé où ? »). Je suis allé là, là et là. Pour celle-là, on prend certaines libertés chronologiques, pour ne pas embrouiller l’auditeur. « Et alors, c’était bien ? », on répond « pas mal » (ce qui ne veut rien dire, hein ?) et puis après on s’essaie à une espèce de réflexion autour de la notion de « liberté », où on va même jusqu’à inclure des histoires d’ « espace-temps », suffisamment pour que l’autre se dise que faire le tour du monde, ça rend pas forcément meilleur en philo.
La version la plus commune est la « 5-10 min », ce qui est suffisant pour présenter le triptyque gagnant : itinéraire/réflexion pseudo-philosophique sur la « liberté »/une anecdote en bonus. Pour ceux qui n’auraient pas encore entendu le récit de cette aventure, je la conseille : un bon rapport qualité-prix sans trop perdre de temps. Bien sûr, on risque de faire l’impasse sur Pagan et ses pagodes, le cyber-café-où-l’on-dort à Tokyo, le soldat israélien, le récit de ma noyade à Sandy Beach, les voitures américaines, et tout un tas de trucs, mais on aura forcément un peu de Transsib et un peu d’Inde, ce qui est sans doute l’essentiel, vous en conviendrez.
Et puis après, pour les plus accros, il y le menu gastronomique (celui où on n’en peut vraiment plus à la fin) : 1h30-2h. Cette version-là est nécessairement personnalisée, et c’est là où elle fait la différence. Et boum, je sors le netbook pour montrer les photos en même temps. Oui, c’est interactif. Il y a le son et l’image. Le coup du hangar à Xi’an, du Taj à Agra et de la « Dodge » aux Etats-Unis, ça passe tout de même mieux avec les phtos, non ? Personnalisable donc : le taux d’anecdotes est variable, le récit du coucher de soleil est obligatoire pour les filles, le passage sur Las Vegas est courageusement zappé avec les « camarades », mais Luang Prabang est à tous les menus. Et le Thar en dessert. C’est comme ça.
Et pourquoi d’autres versions modulables en SMS et autres Twitter…
Et alors….c’était comment ?
Et l’éléphant ? T’étais pas sur un éléphant à un moment ? Dans quelle version on y a droit, hi! hi! hi!